Actualité du 20 mars 2024 – les élections présidentielles en Russie
Dans un contexte d’enlisement de la guerre russo-ukrainienne et une escalade des tensions entre les pays européens et la Russie, le chef du Kremlin voit son rôle reconduit pour un troisième mandat consécutif.
Un processus électoral trouble pour les élections en Russie
Candidats et dates des élections en Russie
Vladimir Poutine remporte les élections présidentielles en Russie du 15 au 17 mars dernier avec un score de 87,8%, un record depuis la chute de l’URSS. De même, le taux de participation s’élevant à 77% est un record à cet égard. Hormis son discours sur l’état de la Nation tenu le 29 février dernier, le chef du Kremlin n’a pas réellement fait campagne. Même si cette adresse s’ouvre par la question de l’ « opération militaire spéciale », Vladimir Poutine a surtout pu présenter son programme pour la prochaine investiture.
Des promesses ambitieuses apparaissent concernant la santé, l’éducation, l’investissement dans les infrastructures des régions les plus reculées de Russie, etc. Des affiches appelant au vote, pour le président candidat, étaient placardées dans les « villes russes ». Celles-ci comprenaient les régions occupées dans l’est ukrainien, comme à Donetsk. Un autre aspect de la campagne est le recours à la « ressource administrative ».
Le taux de participation
Ainsi, ceux dont la subsistance dépend de l’État – retraités, fonctionnaires ou grandes entreprises- ont fait l’objet de pressions. La compagnie aérienne Aeroflot, entre autres, se chargeait de fournir un taux de participation de 90% de ses employés dont la majorité devait voter à distance. En effet, on généralise le vote électronique dans vingt-neuf régions.
Cela reste équivalent au tiers des suffrages. À cela, s’ajoutent le vote sur trois jours. Ou encore, l’interdiction d’observer le scrutin sans être accrédité par le pouvoir. Tout cela reste des moyens de faciliter la fraude contre les élections présidentielles en Russie.
Une opposition réduite au silence
Par ailleurs, le rejet de six candidatures marque cette « campagne électorale ». La plus marquante semble sans doute celle de Boris Nadejdine. Ce dernier restait l’un des seuls candidats à appeler à la fin la guerre en Ukraine. La Commission électorale central accepte et officialise sa candidature le 31 janvier. Celle-ci opère un revirement le 8 février en l’accusant d’avoir présenté des signatures de soutien « irrégulières ».
Outre le candidat du parti « Initiative citoyenne », Vladimir Poutine ne faisait face à aucune réelle opposition. Entre les candidats, on observe certes des débats. Néanmoins, ils restent loyaux au président en place dont ils ne peuvent critiquer la politique.
Enfin, une partie de la population civile a exprimé son opposition à ces élections. Ils ont décidé de s’accorder sur un vote à une heure précise. C’est l’initiative : « Midi contre Poutine ». Loin d’amorcer une révolution, elle avait pour but de permettre aux tenant d’une démocratie en Russie de se retrouver, se compter et ne pas se sentir seul. En outre, les urnes ont fait face à des protestations plus violentes. On mentionne notamment une femme qui a incendié un isoloir le 15 mars dernier. Ou encore, celle qui a versé du colorant dans une urne. Au total, 13 personnes ont été arrêtées pour avoir commis des actes similaires.
Réaction de la communauté internationale
Au-delà de confirmer la loyauté des citoyens russes envers leur dirigeant, ces élections sont un message adressé aux nations européennes et aux États-Unis qui sont au centre de leur propre campagne électorale. Le scrutin montre que Vladimir Poutine bénéficie du soutien de la majorité de sa population pour son action en Ukraine. Il demande à ces adversaires : « est-ce le cas pour vous ? ».
En effet, la guerre aux portes de l’Europe est source de divergences de positions entre les capitales du vieux continent. On observe des idéologies avec certaines, dont la France, abordant un scenario d’envoi de troupes sur le sol dans le futur. D’autres s’y opposent fermement. Outre Atlantique, le soutien financier et militaire de Washington au profit de Kiev fait l’objet de contestation au sein du Congrès américain. Cela apparaît dans un contexte de campagne électorale qui pourrait sceller le sort de l’Ukraine. Malgré ces désaccords, les chancelleries européennes s’unissent dans la condamnation du scrutin.
« Le processus électoral en Russie s’est déroulé dans le contexte d’une répression accrue à l’encontre de la société civile et de toute forme d’opposition au régime». C’est ce que déclare le lundi 18 mars le ministère français des Affaires étrangères. La France, comme l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis, ont toutes condamné la tenue d’élections dans les territoires ukrainiens occupés.
Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, a quant à lui décrit un Vladimir Poutine « ivre de pouvoir » qui « fait tout pour gouverner éternellement ». La Turquie, membre l’Organisation du Traité Atlantique Nord (OTAN) et fournisseur d’armes à l’Ukraine, a « félicité » le président russe reconduit. Elle semble plus nuancée. En parallèle, Vladimir Poutine a été félicité par Pékin et New Dehli. Ils voient en Moscou un partenaire stratégique important avec lequel ils souhaitent développer leurs partenariats. L’Iran et la Corée de Nord, deux fournisseurs d’armements à la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine, partagent cet enthousiasme.
Reda Frid, chargé de veille auprès de Adfontesrealis.fr